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Alain Delaunois in "Petit Guide de l'Irrévérence (au Pays de Liège)", Ed. Centre Wallonie-Bruxelles/La Châtaigneraie/Yellow Now, 2011

Impeduglia, Laurent

 

Sur bon nombre de sites Internet, on découvre régulièrement une page indiquée comme « en construction ». Ainsi pourrait-on dire du monde que présente Laurent Impeduglia (né à Liège en 1974), qu’il tire son énergie exhubérante du fait de se trouver perpétuellement « en construction », lui aussi. Des études de peinture avec Daniel Fourneau à l’Académie des Beaux-Arts de Liège, un goût prononcé pour l’imagerie populaire et les couleurs vives, les héros de comics et cartoons américains (Hulk, Batman, Godzilla, au moins autant que Mickey et Snoopy), la culture pop, la musique rock, les jeux vidéos, et le street art constituent les fondations d’une œuvre qui s’est manifestée initialement dans les marges de l’art et de la BD, notamment au sein des fanzines auto-édités par le collectif liégeois Mycose (avec Phil, Benjamin Monti, P’ti Marc, Gentiane Angeli, Aurélie William-Levaux…)

Envisagé depuis sur une masse de supports – peintures à l’huile, aquarelles sur papier, dessins, sculptures, installations, fanzines  -, et exposé aujourd’hui à Anvers, Berlin, Düsseldorf, Paris, New York ou Tokyo, voici un travail qui s’impose par la cohérence de ses thèmes et sa puissance esthétique. L’artiste se représente lui-même en ouvrier de chantier, poussant une brouette, comme s’il lui fallait à la fois dégager gravats et décombres du vieux monde bientôt réduit en poussière (No One of Us Will Survive), et amener sa matière première, essentiellement des briques, sur son lieu de travail. Make a wish, build your life, titre qu’il avait donné à une exposition d’envergure en 2007 aux Brasseurs à Liège, sonne en effet à la fois comme un slogan activiste adressé au public, réminiscence d’utopies et d’idéaux collectifs, et comme le credo personnel de l’artiste, qui dans le monde de l’art doit très concrètement mettre la main à la pâte pour transformer son existence. Cette vision à la fois réaliste et cynique d’un marché qui connaît ses montées en flammes et ses descentes en flèches (Art is Money), Impeduglia la met souvent en scène de manière sarcastique, comme l’assurait In Gold We Trust, une autre de ses expositions (Espace Uhoda, 2006). Les références à la religion, associées à une tête de mort toujours noire et omniprésente, abondent dans ses peintures et dessins, églises, croix, grottes, montagnes, figures de Christ… Mais c’est pour mieux s’en moquer et s’en défaire, comme dans ce ridicule igloo de briques, surmonté d’une croix, d’où s’échappe par un phylactère un « Where are you Jesus » qui ne comporte aucun point d’interrogation. Ancré dans une peinture narrative qui accumule les détails significatifs de l’aliénation en société (églises, usines, châteaux-forts), dans une relecture personnelle de la culture contemporaine, ainsi que dans la multiplication de signes ésotériques et symboles alchimiques, le travail pictural de Laurent Impeduglia trouve souvent son point d’orgue dans la dérision des titres ou injonctions, intégrés à l’œuvre : Quitter Liège, Jesus Did Not Wear Socks, ou encore Iconoclastik painting defender.

Alain Delaunois      

Dates :1990. « La peinture c’est très facile lorsque vous ne savez pas comment faire, lorsque vous savez c’est très difficile. » (Edgar Matisse)1994. « Pour être un bon artiste, il ne faut pas savoir peindre. » (A la Galerie NV.) 1999. « Il faut apprendre à désapprendre ! » (A l’Académie.)2000. « Il n’y a rien de plus ennuyeux qu’un beau tableau » (Une inconnue lors d’un vernissage.)2008. « Tu seras le meilleur peintre gaucher !  » (Une diseuse de bonne aventure.)Citation :« L’humanité a besoin de sublime. Le sublime du sublime, c’est l’art. Le sublime de l’art, c’est l’avant-garde ». Roland Topor.