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Domique Legrand dans le Mad ,supplément du soir

Culture pop, alchimie, comics, Laurent Impeduglia (Liège, 1974) porte bien son nom : Impeduglia signifie « s’emmêler les pinceaux » en sicilien ! Rétif à toutes les écuries, le peintre, le dessinateur, le bédéiste de Mycose, s’aventure sur un début de carrière internationale. Il expose à Berlin, San Francisco, Paris, New York, Tokyo. Plus connu hors frontières qu’en son pays de Liège, le professeur à l’Ecole supérieure des Beaux-Arts revient à La Châtaigneraie avec un lot de travaux inédits qui valent le détour.

Sous diverses couches de lecture, du sens premier qui ravit les mômes au subliminal, Impeduglia se joue des étiquettes au profit d’un travail de plus en plus spontané. On se souvient d’une scénographie très ludique aux Brasseurs, en 2007. Ici, la quête initiatique joue l’accrochage classique. Le résultat est à la hauteur : chaque œuvre ouvre un récit où la critique sociale se fait de plus en plus percutante, à hauteur du paysage industriel déserté en bords de Meuse…

L’antihéros indigné

Ses toiles récentes dont les fonds sont réalisés à l’huile rebondissent d’idée en idée, dans des compositions au vocabulaire récurrent de fin du monde. Comme dans toute histoire, il y a un happy end, réduit à une grimace…

Cheminées fumantes d’usines et donjons noircis d’où émerge un phylactère : « Where are you Jesus ? », Table 3 avec Bob l’Eponge et portrait de mon chien futuriste, Peinture avec titre idiot, Bananas Mountain ou le phénoménal Tableau post-néo-crétin multiplient les références à la mort, à la religion, superposant d’étonnants dialogues sur les dérives spéculatives qui entourent toute œuvre.

A la fois fouillé et dépouillé, le style d’Impeduglia traite toujours des mêmes sujets avec autodérision, couleurs vives sur fond sombre. Donjons aux tours effilées, murs de briques proches de l’enfance, arcs-en-ciel de rêves, assemblages de Lego géants, cieux transparents et muets : éminemment ludique mais tout aussi peu naïf, l’univers apparaît alors comme une forêt de symboles où l’on découvre quelques clés par glissements progressifs.

Cette Bad pop painting ne cesse de chercher son chemin en sautant dans toutes les flaques de l’utopie ! En filigrane, sous l’œil torve de la statuette de Saint E.T., cette exposition est un régal absolu qui rompt avec l’esthétique conservatrice d’un Jeff Koons ou Damien Hirst.

Dissident insolite, antihéros indigné, Laurent Impeduglia présente également une série inédite de dessins, de petites perles obsessionnelles qui relancent le choix des grands thèmes existentiels. Fou, jaune ou sardonique, le rire n’est pas seulement le propre de l’homme, c’est un désinfectant salutaire.