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2007:Marie Guerisse:Build for Life Lecture de l'exposition

Build for live !

 

Lecture de l?exposition Passage

 

par Marie Guérisse

 

 

En une vaste métaphore filée, le travail de Laurent Impeduglia nous emmène à la découverte de nos propres chemins de vie. De la thématique de la transformation par la (dé)construction ? abordée depuis le début du parcours de l?artiste ?, émerge aujourd?hui un propos essentiel, débarrassé des protections de l?anecdote et de la dérision.

 

En effet, l?exposition Passage évoque l?évolution non seulement par son titre, par les pièces et leur disposition de la cave au second, mais aussi par la maturation de l??uvre elle-même. Car si l?existence de l?individu est marquée par des périodes de mutation plus ou moins bouleversantes et espacées dans le temps, la quête de l?artiste ? vers sa justesse ? connaît de nombreuses phases entrecoupées de remises en questions. Rien ne se fige. A chaque instant, les désirs, les rencontres, les découvertes, les matériaux et les accidents recentrent la quête.

 

La construction de soi et de son rapport au monde est un chantier où l?on croise d?anciennes ébauches, de vieux piliers, des matériaux recyclés, d?autres glanés et entreposés dans le « sait-on jamais », des photos, des jeux vidéos, des affiches, des cédés, des poupées grandeur nature, des fanions, des vieux travaux, des essais inachevés, des notes de projets raturées, une escabelle, des maquettes, des feuilles d?architecte, des traces de pas, l?odeur du bois, le chant de merles et du juke-box, des branches, des pots entamés ? 

 

De l?atelier à l?expo, le laboratoire s?épure pour livrer une étape ? provisoirement aboutie ? de cette construction perpétuelle. Elle prend ici des visages multiples, du plus concret au plus métaphysique : murs de briques (murailles, tours, puits?), structures de soutien et de protection ? physiques et psychiques ? que l?homme se dessine pour avancer dans la vie, souhaits raisonnables et rêves inaccessibles, quête intellectuelle de vérité, recherche spirituelle?

 

Ainsi, construire une muraille et se réfugier dans une tour, s?élever en gravissant une montagne, franchir un mur d?obstacle, creuser un puits au plus profond de soi, s?y abreuver, y projeter ses désirs, changer le quotidien « plombant » en moments précieux, bâtir une église sur la foi ? en soi ! ? sont autant de pierres à l?édifice de l?esprit, du corps, du c?ur, de l?art, de la société, de l?ordre universel?

 

Car chaque cellule possède la mémoire du monde et participe au grand tout. Du microcosme au macrocosme, du mur d?enceinte à l?inconscient, chaque élément s?intègre dans l?édifice d?ensemble, interagit et nourrit la recherche d?harmonie générale.

 

Des spectateurs aux travaux ? à l?allure relativement hermétique ? la connexion se fait sans avoir l?air d?y toucher ! La culture populaire, par ses codes, ses symboles et les souvenirs collectifs qu?elle nous laisse y participe. L?artiste jalonne son univers de références, qu?il se réapproprie : le chemin sinueux, le château, l?église, le puits, le four (où se transforme la matière), l?arc en ciel, la couronne, l?escalier, le panneau de chantier, la brouette, l?arbre blanc sans feuillage (en chemin vers la renaissance), les chiffres (selon la cabale, le 13, par exemple, désigne le passage), les codes de BD, les Lego, les expressions figées en latin, les énoncés simples en anglais (langue universelle, qu?on le veuille ou non !), les couleurs primaires (le bleu évoque l?immatériel), les étendues de blanc (que l?on associe notamment à la transformation), le dessin aux accents enfantins, les formats (le petit appelle l?intimité, le grand la multiplication des effets), le papier millimétré (destiné aux plans d?architectes ou à la retranscription des secousses telluriques !), invitent, par les résonances, à visualiser son propre cheminement, à cerner ses murailles, à franchir ses obstacles, à verbaliser ses souhaits et à grandir, en croyant à ses rêves.